Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Entre nous et news
24 décembre 2008

"My Bluberry Nights", à déguster...

bluberryPrésenté lors de l’ouverture du Festival de Cannes, le nouveau film de Wong Kar Wai, « My Blueberry Nights », met en scène une histoire vieille comme le monde : le chagrin d’amour.


Elisabeth, le cœur brisé, cherche chaque soir le réconfort dans un bar. Aussi seul qu’elle, le patron, Jérémy, la console et tombe amoureux. Jusque là, rien de plus cliché. Lui collectionne les clefs des couples séparés. Elle déguste les parts de tarte à la myrtille que les clients n’ont pas consommées. Puis la jeune fille fuit à travers l’Amérique pour oublier sa rupture, croiser d’autres destins, chercher la solitude, explorer le vide. Occupant des emplois de serveuse, elle se lie d’amitié avec des clients. Une relation épistolaire l’unit à Jérémy. Tel un ami, elle lui parle de ses rencontres. Un flic alcoolique et désespéré (David Strathairn) qui refuse d’être séparé de sa femme (Rachel Weisz), aussi désirable que perturbée. Une joueuse professionnelle qui met sa vie sur le tapis pour oublier l’absence de son père. A travers ces autres écorchés de la vie, Elisabeth devient spectatrice de la solitude et du temps perdu à l’instar de Proust. Laissant derrière elle une vie de souvenirs, elle se perd pour mieux se trouver et se retrouver finalement.


Casting éclatant pour le premier tournage américain du réalisateur hongkongais. Chan Marshall alias Cat Power. Jude Law, dans le rôle du petit patron de bar, reste fidèle à son image de bel homme tendre sans se laisser aller au mélodramatique. Natalie Portman, accro aux casinos, est déconcertante en vamp habitée par des errances d’enfance. Norah Jones signe son premier film. C’est sa voix envoûtante qui pousse Wong Kar Chai à l’engager. La chanteuse est simple, naturelle, charmante et vraie. Le film pourrait se résumer de la même manière.


Quant au réalisateur, après le succès de « In the Mood for Love » et « 2046 », il fait ici le pari d’exprimer le charme oriental dans un décor américain. Pour y parvenir, il reste fidèle à son univers et à ses obsessions. Omniprésence des couleurs : teintes flashy, flous, ralentis, ombres, exhibition de chaque décor et costume. Une mélancolie transportée par l’ambiance nocturne, par des métros partant nulle part, des routes désertiques. Une poésie de l’insignifiant. L’esthétique emplit le film et on ne s’en plaindra guère vu la parfaite maîtrise de l’image. La musique, principalement jazz et blues, tient son rôle de révélatrice de sentiments. Avec bien entendu un morceau de Norah Jones, le réalisateur s’offre par la même occasion une excellente bande-son signée Ry Cooder. Les éléments du décor sont savamment travaillés. Le réalisateur s’arrête sur des poignées de porte, des bouts de mur. La façon dont il décline les différents plans du bar new-yorkais, au début du film, est impressionnante. On remarque la caméra de surveillance qui montre une bagarre ou encore la tromperie du copain d’Elisabeth. Impression de dérober cette scène à l’acteur, comme si le téléspectateur était à l’intérieur.

 

Le film est beau dans la forme mais il l’est aussi dans le fond. C’est suffisamment rare aujourd’hui pour le souligner. Son regard sur le pays des billets verts est libre, un peu naïf mais surtout pas superficiel. Le scénario est certes quelque peu léger avec des thèmes typiquement américains comme la violence dans le couple ou l’addiction au jeu. Vite oublié face à la poésie et à la tendresse que la douleur dégage et la réalisation fulgurante. « My Blueberry Nights », un dessert exquis à déguster sans modération.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Entre nous et news
Publicité
Archives
Publicité